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L’ancien médecin Joël Le Scouarnec jugé pour pédocriminalité : 20 ans de prison, avec deux tiers de période de sûreté

Publié : 28 mai 2025 à 6h00 - Modifié : 28 mai 2025 à 16h11
Mandy Vereecken

Justice

Ce mercredi 28 mai, la cour criminelle de Vannes a prononcé la peine maximale de 20 ans de réclusion criminelle à l’encontre de Joël Le Scouarnec, 74 ans, ancien chirurgien reconnu coupable de viols et d’agressions sexuelles sur près de 300 personnes, majoritairement des mineurs. La peine comprend une période de sûreté des deux tiers.

Dans sa décision, la cour a souligné la gravité exceptionnelle des faits, en insistant sur le nombre élevé de victimes, leur jeune âge, ainsi que le caractère compulsif des actes reprochés à l'accusé. En revanche, la juridiction a choisi de ne pas appliquer la rétention de sûreté, une mesure réservée aux criminels jugés à haut risque de récidive, estimant que l’âge avancé de Le Scouarnec et sa volonté affichée de réparation constituaient des éléments atténuants.

L’avocat général Stéphane Kellenberger avait pourtant demandé cette mesure rare, utilisée notamment pour les délinquants sexuels, rappelant la "dangerosité" persistante de l'accusé, qu’il avait qualifié de « diable » au cours de son réquisitoire.

Les faits, commis entre 1989 et 2014, concernent 299 victimes identifiées, dont une majorité étaient des patients mineurs. Le prévenu a reconnu l’ensemble des accusations portées contre lui, admettant également sa responsabilité indirecte dans la mort de deux personnes, l’une par overdose, l’autre par suicide.

Lors de sa dernière prise de parole, Joël Le Scouarnec a déclaré à la cour :
« Je ne demande aucune indulgence. Accordez-moi simplement la possibilité de changer et de retrouver une part d’humanité. »

Son avocat, Me Thibaut Kurzawa, a défendu une démarche sincère de reconnaissance et de réparation, tandis que plusieurs avocats des parties civiles ont exprimé leur scepticisme.
« Reconnaître tout, c’est parfois ne rien reconnaître », a estimé Me Giovanni Bertho-Briand, quand Me Delphine Caro a dénoncé une posture de façade :
« Votre prétendue repentance, c’est une mise en scène. Qui peut croire que vous avez changé ? »

Le ton s’est durci encore avec les mots de Me Thomas Delaby, pour qui Le Scouarnec incarne « la pire figure de pédocriminalité de masse jamais connue », n’hésitant pas à parler de « bombe atomique de la pédophilie ».

Le procès, entamé le 24 février, a mobilisé près de 60 avocats de parties civiles, qui ont plaidé durant plusieurs jours, seuls ou en groupes, pour porter la voix des victimes.

« Aucune peine ne compensera la douleur des victimes », a affirmé Me Romane Codou, tandis que Me Delaby concluait : « Elles ne vous pardonneront jamais. »

Mais l’affaire n’est sans doute pas close. Le parquet a évoqué la possibilité d’une future procédure, notamment pour traiter des cas de victimes encore non identifiées.

Pendant l’audience, un collectif de victimes s’est rassemblé devant le tribunal de Vannes. L’une de ses représentantes, Manon Lemoine, a annoncé qu’une rencontre avec le ministre de la Santé, Yannick Neuder, aurait lieu le 11 juin. Ce collectif dénonce le « silence politique » autour de l’affaire.

Interviewé, le ministre a promis de travailler avec le ministre de la Justice afin que plus jamais des patients, et surtout des enfants, ne soient livrés à de tels prédateurs.
« Ce qu’on ressent, c’est : plus jamais ça. Comment a-t-on pu en arriver là ? », a-t-il déclaré.