Manque d’infirmiers : ce centre de soins restreint ses interventions, faute de pouvoir embaucher facilement

« Centre de soins, bonjour. Très bien, rendez-vous confirmé pour demain, entre 7 h et 9 h. » En apparence, la routine se poursuit dans les locaux du centre de soins situé rue De Lattre de Tassigny à Sainte-Marie-aux-Mines. Le téléphone sonne, les rendez-vous s’enchaînent. Pourtant, derrière cette façade ordinaire, l’inquiétude est palpable.

Depuis plusieurs semaines, l’établissement tourne au ralenti. En cause : une diminution critique des effectifs infirmiers, qui a contraint l’équipe à réorganiser complètement son fonctionnement, notamment en réduisant le nombre de patients pris en charge lors des tournées. « Nous avons déjà dû cesser nos interventions à Lièpvre, ce qui représentait une trentaine de patients », explique Sophie Rieg, secrétaire de direction. Ces derniers ont été redirigés vers d'autres cabinets, à Lièpvre ou Sainte-Croix-aux-Mines. Désormais, c’est également à Sainte-Marie-aux-Mines que des patients sont progressivement orientés vers d’autres professionnels du secteur.

La situation est critique : l’équipe, autrefois composée de dix infirmières, a vu ses rangs se clairsemer. Absences pour raisons médicales, fins de contrats non renouvelés, démissions… les causes sont multiples. « C’est une accumulation de circonstances : certains contrats courts n’ont pas été prolongés car les infirmiers avaient d’autres projets. Trois salariées sont en arrêt, pour raisons de santé, dont un accident du travail. Et il y a aussi eu des départs », détaille Sophie Rieg.

Les efforts pour recruter n’ont pourtant pas manqué. « Des offres ont été publiées en ligne, affichées dans nos locaux, partagées sur les réseaux… Mais nous n’avons reçu aucune candidature », déplore-t-elle. Une réalité qui ne la surprend plus. Depuis la pandémie, la profession souffre d’un manque d’attractivité, en particulier dans les zones rurales. « Beaucoup d’infirmiers ont quitté le métier. On n’est pas un cas isolé, les hôpitaux, les Ehpad, et toutes les structures de soins connaissent les mêmes difficultés. »

Malgré la surcharge de travail, l’équipe s’est attachée à assurer une transition la plus fluide possible pour les patients. Un courrier a été remis à chacun, avec les coordonnées des cabinets libéraux du Val d’Argent. Pour ceux ayant des troubles cognitifs ou des difficultés à communiquer, les familles ou les aidants ont été contactés. « C’est un travail minutieux, mais nécessaire. On ne peut pas abandonner nos patients sans soins, sans pansements, sans insuline », souligne-t-elle.

Cette situation préoccupante ne remet pas en cause, pour le moment, le projet de maison de santé porté par la communauté de communes depuis trois ans. « Le projet reste d’actualité, avec une dimension pluridisciplinaire : médecins, kinés, pharmacies, et une infirmière libérale engagée dans l’initiative », affirme Noëllie Hestin, maire de Sainte-Marie-aux-Mines. Toutefois, la disparition du centre de soins infirmier oblige à repenser l’équilibre du futur établissement. « Il faudra adapter le projet avec les partenaires encore impliqués. »

La maire reconnaît toutefois la fragilité du système de santé local. En deux ans, deux médecins ont fermé leur cabinet. « Le manque de professionnels de santé en milieu rural est criant. Et en tant qu’élus, nous ne pouvons pas pallier les responsabilités de l’ARS ou de l’État, que ce soit sur les salaires, les horaires ou la qualité de vie des soignants. »

Ce week-end de Pentecôte, le centre infirmier restera fermé, faute de personnel disponible. « Nos infirmières ont déjà travaillé toute la semaine. Les faire revenir ce week-end ne serait pas légal au regard du droit du travail », précise Sophie Rieg.

Une réouverture partielle est prévue au début de la semaine suivante, limitée aux actes ponctuels comme les prises de sang et les injections. Mais au 20 juin, seule une infirmière à temps partiel restera en poste. À moins, d’ici là, qu’un recrutement inespéré ne vienne inverser la tendance.